Je vais aborder ici un format de rétrospective très classique et populaire du fait de sa simplicité à mettre en place et partager mon expérience sur l’animation de celui-ci tout en proposant une option pour l’enrichir.

Matériel et préparatifs

En effet, il faut très peu de préparatifs, des post-it (plusieurs couleurs c’est encore mieux), un stylo ou marqueur par personne.

Pour travailler en ligne, c’est également très simple avec n’importe quel outil qui doit permettre de faire des colonnes avec des titres et de recueillir des éléments par les participants puis de les afficher aux yeux de tous. On pourrait même utiliser une feuille google sheets !

L’animateur va donc proposer 3 colonnes ou 3 zones (Finalement qu’importe la disposition) et demander aux participants de remplir sur des post-it des éléments vécus durant l’itération en répondant à ces questions :

 « Qu’est-ce qui vous a rendu heureux ? » (Glad)

« Qu’est-ce qui vous a rendu triste ? » (Sad)

« Qu’est-ce qui vous a rendu fou / énervé ? » (Mad)

On peut aussi dessiner des smileys à la place d’écrire les titres, et quand on a un paper-board en fond ou qu’on est en numérique, on a un peu plus de place, je propose de mettre carrément la question (que vous pouvez reformuler à votre façon). Cela apporte une clarté aux participants s’ils sont novice sur cette pratique.

Durée

Comme pour toute cérémonie agile, le temps à y consacrer dépend de nombreux facteurs : la durée d’une itération, la taille de l’équipe, son niveau de pratique et d’habitude, les contraintes de l’organisation (on a parfois des injonctions managériales qui consiste à limiter le temps disponible pour cette cérémonie).

En général, je trouve difficile de mener ce type d’atelier en moins d’1h, et pour les grandes équipes qui débutent, 1h30 à 2h sont souvent nécessaires. Tout dépend aussi jusqu’à quel niveau de compréhension et de détail on creuse pour la constitution des actions, le temps qu’on souhaite se donner pour passer en revue les actions élaborées lors de la précédente rétrospective.

C’est là tout le talent du facilitateur s’exprime : il doit tenir son chrono et permettre au groupe de repartir avec ce qu’il faut.

Déroulement

Le format est donc très connu, mais je vais en parler ici pour partager mon expérience, mettre l’accent sur des points d’attention et proposer des améliorations.

Comme pour toutes les rétrospectives, cela se déroule donc comme suit :

  • En 5 étapes (Introduction, Recueil des données, Générer des idées, Définir des actions et Clôture).
  • Établir une durée cohérente pour chaque étape suivant le temps qu’on veut allouer à l’atelier.
  • Une idée par post-it
  • Chaque participant n’est pas obligé de mettre au moins un post-it de chaque catégorie. Il peut en mettre autant qu’il veut dans chaque. (A la rigueur c’est à l’animateur de décider ce qu’il impose à ce niveau, s’il en ressent le besoin)

Pour un créneau calibré sur 1h30 cela donnerait en gros ceci :

  • Étapes préliminaires (10 min) : Passer en revue les actions de la dernière itération. Sont-elles toutes résolues, toujours d’actualité ? Pourquoi ? Météo de l’équipe
  1. Introduction : pose du contexte et explication des règles par l’animateur (5 min)
  2. Recueil des données : écriture des post-it pendant (5 min), mise en commun et explications (20 min)
  3. Tri et organisation des idées recueillies, priorisation de celles qui comptent le plus pour le groupe (10 min)
  4. Rédiger les actions en définissant un porteur, une date, comment on peut mesurer que c’est mieux après ? (20 min)
  5. Clôture : rétro de la rétro (5 min)

Et oui la somme fait 1h15, car il est toujours prudent d’organiser le timing de ces ateliers avec une petite marge : Les participants peuvent arriver en retard, en mode numérique, il peut y avoir aussi des problèmes de connexion au démarrage. Et si tout se passe comme sur des roulettes et que la rétrospective se termine quelques minutes plus tôt, tout le monde sera content de pouvoir passer à la suite sans avoir à courir.

Lors de l’étape de l’écriture des post-it, il arrive souvent que l’équipe ait du mal à différencier les éléments Sad ou Mad qui sont associés à du négatif sans les nuances nécessaires, pour cela il faut bien comprendre la nature des sentiments auxquels ils font référence :

Sad, c’est la tristesse, le deuil : cela réfère à un évènement passé, on met donc ici des choses qui ont eu lieu et qu’on ne peut plus améliorer directement. Par contre, on peut se poser la question de comment on aurait pu faire autrement. Si on doit faire émerger des actions cela sera donc plus de l’ordre de faire en sorte que cela ne se reproduise plus ou que cela ait moins d’impact la prochaine fois.

Mad, c’est la colère, « ça me rend fou » : on est donc dans un contexte qui ne correspond pas avec l’idée qu’on s’en été faite, cette sensation désagréable va fournir une énergie d’envie de changement.

Cela est le propre du sentiment de colère, en caricature: je ne suis pas content d’une situation alors je deviens tout rouge, je crie fort et je casse tout. Dans un milieu professionnel apaisé, on va donc avoir cette petite boule d’énergie jusqu’alors non exprimée qu’on va pouvoir convertir en actions concrètes et utiles au groupe grâce à la rétrospective !

Glad, c’est la joie, on y passe souvent moins de temps pour générer des actions mais cela aide à souder l’équipe et permet de faire émerger la nécessité de poursuivre certaines pratiques pour le bien du groupe, comme l’accueil d’un nouvel arrivant ou un passage de connaissance. On peut sortir une action du type « continuer à » si l’équipe a besoin de le garder à l’esprit.

Comme on le voit, ce thème de rétrospective s’appuie donc sur les émotions, il faut savoir que les émotions de bases desquelles découlent toutes les autres, sont tout simplement au nombre de 4.

Joie, Tristesse, Colère et Peur. Il nous en manque donc une dans la rétrospective, la peur ! 

C’est pourquoi je propose une amélioration possible qui consiste à ajouter une colonne « Afraid » qu’on peut mettre en question sous la forme : « Que craignez-vous qu’il arrive ? ». Ainsi, on introduit une notion de vision vers l’avenir ce qui va permettre de porter le regard de l’équipe vers des défis qui peuvent arriver prochainement, cela peut être intéressant, suivant l’intention que vous voulez donner à la rétrospective.

Rappel sur la structure des émotions de base

Lorsque je facilite cet évènement, je commence à passer rapidement en revue la liste des éléments Glad, pour mettre le groupe en posture de bonnes ondes, pour ensuite rentrer dans le vif et passer aux éléments Mad qui, par nature, sont porteurs d’une énergie et d’une motivation à faire changer les choses. Cela sera plus direct pour produire les premiers petits pas qui permettrons, on l’espère tous, de faire avancer l’équipe vers moins de frustration.

On finit ensuite pas la colonne Sad qui contient des éléments que je trouve parfois un peu plus difficile à traiter, car se sont souvent des sujets sans suite ou des problématiques assez ancrées dans l’organisation donc difficile à résoudre en une itération. C’est pour cela qu’il faut garder du temps pour cela aussi !

Si vous avez pris l’option Afraid, vous pouvez l’aborder en dernier, en faisant anticiper votre audience sur les points qui ont été relevés: Comment pouvons nous minimiser l’impact de tel évènement ? Comment pouvons nous nous préparer à cela ? Maintenant qu’on a vu ça, qu’est ce qu’on fait ?

Avec quoi on repart ?

J’en profite pour rappeler qu’il est primordial de ressortir d’une rétrospective avec des actions qui peuvent être traitées par l’équipe elle-même et qui tiennent dans une itération. (Etape 4)

Pourquoi ?

Les actions d’envergure du type « passer en devops » ne se font pas en un jour (Comme Rome). Donc si on ne sort qu’avec des sujets mastodontes à chaque fois, la rétrospective va perdre de son intérêt car d’itération en itération, rien ne bougera. Ne pas prendre trop d’actions non plus, c’est frustrant, mais il faut souvent procéder à une priorisation (par exemple via un dot voting) parce qu’il ne faut pas oublier que l’équipe a souvent beaucoup de travail pour continuer à produire, et malgré la motivation avec laquelle on repart sur le moment, il va parfois être difficile de trouver le temps pour réellement accomplir les actions.

On a donc besoin de « sentir » qu’on avance un peu à chaque fois, qu’après chaque rétrospective, le groupe se sente soulagé d’avoir identifié des petites choses à faire qui font que le quotidien, les pratiques ou la productivité vont s’améliorer.

Conclusion

Ce format est assez direct, ne nécessite pas spécialement beaucoup de matériel ou de talents de dessinateur.

Il est assez efficace car le sentiment de colère est porteur d’énergie qu’on peut transformer en énergie utile et réduire les frustrations.

Pour que ces frustrations soient efficacement dissipées, il est important de trouver un moyen de faire avancer les choses au moins au niveau de l’équipe, sinon cette frustration perdurera au fil des itérations.

Si le facilitateur estime que cela est judicieux, il peut innover et ajouter une colonne « Afraid » qui, à l’instar du Speed Boat (autre format très populaire), permet au groupe de porter sa vision vers l’avenir.

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